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Californication : Le romantisme à l'épreuve du trash

20 Avril 2013 , Rédigé par Asoliloque Publié dans #critique, #californication, #relation, #rock, #sexe, #romantisme, #série, #cinéma

Je crois que Californication a toujours reposé sur une certaine méprise de la part de ceux qui ne l'ont vue que de loin, ce qui a entraîné du coup un certain mépris. En effet, la série a dès ses débuts assumé son côté résolument trash (bien que gentillet comparé à des productions plus underground, on est d'accord) et bâti son fonds de commerce sur la célèbre maxime Sex, drugs & rock'n roll.

 

Par conséquent, elle s'est vu critiquer cette situation presque pléonastique d'un écrivain + déprimé + qui baise à tout va + à Hollywood sous les sunlights (mais pas des tropiques). Il est évident que la série repose sur bon nombre de clichés, mais elle a le mérite de les pousser jusqu'au bout, et d'avoir à son crédit un véritable talent d'écriture (comique ou non) et des personnages forts (sans compter les caméos improbables comme Marylin Manson dans la dernière saison en date).

 

Cependant, là où Californication aurait pu rester un joyeux défouloir où tout le monde partouze avec tout le monde en écoutant les Clash et en fumant des joints longs comme Santa Monica beach, elle a su au fil des saisons centrer son propos, presque insidieusement sur un double questionnement qui transcende largement l'atmosphère générale de la série : Comment être un père quand on est soi-même un enfant ? Et comment aimer une femme alors qu'on a la possibilité d'aimer toutes les filles de Californie, donc de la terre ?

 

Quand on place ces questions au centre de la lorgnette, on remarque que Californication y consacre un temps fou. En effet, les agissements de Hank sont constamment pondérés par l'avis de sa fille, Becca (absolument géniale, probablement le personnage le plus sensé de la série) ou par l'idée qu'il se fait de l'avis de sa fille s'il venait à faire telle action. Incapable de ne pas la décevoir, il est cependant à des années-lumières d'un père absent ou distant, il est juste profondément loser. Mais quand on voit ce que devient sa fille, on se dit que finalement, il n'a pas tant foiré que ça...

 

Mais sa relation avec Karen, sa « femme », est le point d'ancrage de toute la série, et si on fait un peu le tour des six saisons tournées à ce jour, on remarque qu'elles reposent souvent sur un obstacle qui les sépare : dans la première, Karen s'est remise en ménage avec un autre homme, stable et gentil, donc particulièrement chiant. Dans la seconde, Karen part à New York, c'est donc l'éloignement géographique qui fait figure de barrière. Dans la troisième, où Hank est catapulté prof d'écriture à la fac, il se voit harceler par trois nymphettes d'âge et de confessions différentes, qui rêvent chacune de se le taper. Etc...

 

La sixième saison fait franchir un cap supplémentaire dans la série, et cristallise tout ce qui a été dit par le passé : Hank rencontre une véritable adversaire de Karen : Faith. En gros, la même mais avec 15 ans de moins. Fantasme absolu pour une bonne partie de la gent masculine (même si pour ma part, je préfère largement Karen, mais bon), et loin d'être une connasse avisée comme on pourrait le croire au début, c'est elle qui pose définitivement Hank face la croisée des chemins : « J'ai 40 ans, ça fait des années qu'avec Karen, on se court après mais qu'on se sépare dès qu'on se remet ensemble, j'ai fait ma vie et une fille avec elle, est-ce que je peux enfin passer à autre chose pour revivre une histoire avec Faith ? »

 

Peut-être que certains d'entre vous pencheriez pour Faith, mais la thèse de Californication (et je fais partie des partisans de celle-ci) semble être la suivante : On aime qu'une seule personne dans sa vie, et ce quoiqu'il advienne. C'est alors qu'on comprend toute la mise en scène générale de tentations et de dépravations instaurée par Californication. Hank doit tout tester pour se rendre compte que les plaisirs les plus défendus ne peuvent égaler un amour bâti dans la douleur depuis de nombreuses années. Comme le bonheur c'est chiant, on se quitte, donc on s'aime encore plus. Californication fait l'apologie de la fidélité amoureuse (qui n'est d'ailleurs pas forcément synonyme de fidélité sexuelle), en dépit de ce que cela implique.

 

Le romantisme vient donc naître non pas dans une vision rétrograde du couple, mais dans une affirmation de sa valeur à une époque où tout est consommé le plus vite possible. Californication ne critique aucune forme de relation (et force est de constater qu'il nous en montre un tas de possibles), mais pour Hank et Karen, (ainsi que pour Charlie et Marcy, l'autre couple emblématique de la série), il ne semble y avoir qu'une seule possibilité : l'attraction/répulsion jusqu'à la fin des temps.

 

Californication est au final une bonne parabole du cinéma (et de la vie ?) : Le bonheur n'a aucun intérêt à être montré, il n'y a que sa quête qui est intéressante. Et si au passage on peut picoler à l’œil et à l'ombre de corps nus, pourquoi se priver ? Il faut juste espérer qu'en poussant la porte, il y aura quelqu'un qui nous attend.

 

Californication : Le romantisme à l'épreuve du trash
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